dimanche 15 septembre 2013

Marla Zemanova et le puzzle



Marla et le puzzle. Je crois que ces fragments racontent les derniers moment de sa vie, quand elle a commencé à devenir folle. 

Tout n’est question que de casser –et réparer. Détruire, et refaire.
Marla menait de prétendues fouilles archéologiques et John faisait semblant d’y croire, debout comme une statue sur un monticule. Elle prétendait que le sol était fait de pièces de puzzle. Que par endroits le puzzle était fait et organisé, les pièces les une dans les autres, et qu’à d’autres les pièces gisaient en tas, fondaient à cause de la pluie, s’amalgamaient.
« Et quoi, sur ces pièces de puzzle ? Quelle image, quelle figure ou quel motif apparaît si on joignait au bon endroit chaque pièce ? » fit John visiblement démotivé. Marla répondit que du moment où 95% de l’ouvrage était désormais illisible, cela n’avait pas la moindre espèce d’importance. Sur la majorité des pièces apparaissait un brouillard méchant, un gravier à gros grain, du ciel, des fragments de figure… « Rien », disait-elle, « de très déterminant ». Puis ajoutait après silence… « Sur les régions jointes, qui sont rares, on distingue la trame d’impression, l’antique quadrichromie. »
« Ce puzzle te ruinera la santé. »
En effet, elle acquiesçait... « Dans la mesure où même l’étendue exacte du machin rend vaine l’entreprise et fait espérer, pour le moins, des aventures avec plus de ciel et moins de sol. » Foin de tout ceci, elle prit quand même une photo aérienne qu’on la vit raturer encore plusieurs années après.   

jeudi 5 septembre 2013

Mes soucis




J’ai un petit souci. Ces derniers temps, je croise sans arrêt la même personne dans la rue, un garçon que j’ai connu il y a longtemps et jamais revu depuis. Je vois ses caractéristiques (celles dont je peux me souvenir) se manifester sur les exosquelettes de nombreux étrangers dans la rue. Un cycliste, un homme désespérément accroché à la barre dans le métro. Que veut dire la soudaine réapparition de ce spectre ?
Ce que j’aimerais c’est ignorer le plus longtemps possible l’heure qu’il est. M’en remettre à la position du soleil dans le ciel, car il peint une ambiance et une atmosphère, et au tic-tac gras de ma montre parce qu'il me rappelle que le temps a une densité fabuleuse, minuscule, tranquille et calmante.  De toute façon je sais qu’il faudra repartir, peut-être très loin, et l’heure qu’il est n’a rien à voir avec ce fait. Je ne sais pas à quoi ressemble l’endroit où je vais, je ne crains rien de ses potentiels dangers. Ce moment est bizarre. Nous ne sommes pas en vacances mais nous ne travaillons pas non plus. Nous sommes en chasse, à perdre notre temps sur les routes désertes. Toute exploration, tout arpentage devient un acte irrationnel proche de la folie et qui s’essouffle le long des routes mal apprêtées. Toute exploration devient panique.
Les deux pochetrons, sur un quai de gare. Deux types ivres noirs étaient venus voir une dernière fois si le train passait ou pas. L’un des deux avait perdu ses quatre dents de devant et crachait du sang.
L’autre avait simplement l’air un peu triste. 



Un petit texte exhumé de franges bizarres du passé, assorti d'un dessin plus récent. On y voit l'un des deux alcooliques décrits à la fin du texte. Se pourrait-il que ces deux alcooliques soient les épaves de personnages qu'on ait rencontré ailleurs, amaigris par de terribles évènements? We wonder. 
Autre petite chose: Fabrice Mouyon, Photographe, et moi-même, menons un projet qui j'en suis sûr va vous ravir: une correspondance texte-photos, pouvant aboutir plus tard à une auto-publication. Fabrice est par ailleurs un remarquable opérateur d'images, je recommande son travail.  Les premières correspondances sont disponibles ici !